Le Mans 1986. La Porsche 961 no 180

24 heures du Mans 1986 - Porsche 961 no 180Audi arrive aux 24 heures du Mans 2012 avec une nouvelle R18 dotée de la technologie Quattro. La transmission intégrale n’est pas inconnue dans la Sarthe. Petit retour en arrière sur la technologie 4x4.

 

1897, l'ingénieur marseillais Georges LATIL fit breveter le principe d'une transmission articulée, permettant d'actionner les roues d'un essieu brisé, les rendant ainsi à la fois motrices et directrices.

1898. Latil adapte son idée dans une voiturette, et fait aisément et sans aucune réparation, le voyage de Marseille à Paris, aller et retour.

1900 Ferdinand Porsche travaille pour le compte de la manufacture impériale de carrosse Jakob Lohner & Co (Hofwagenfabrik) dirigé par Jacob Lohner. Représentant cette entreprise lors de l'Exposition Universelle de Paris en 1900, le jeune Porsche remporte un prix grâce à une voiture à traction électrique de sa conception qui roule à 40 km/h. Cette première réalisation mettait en œuvre un système Lohner-Porsche. La voiture est équipée de deux moteurs électriques installés sur l’essieu avant et alimentés par batteries. Le concept fût ensuite amélioré en installant deux moteurs électriques supplémentaires sur les roues arrière.

1902 A Amsterdam, la Spijker company fabrique une Spyker 4 roues motrices équipée d’un moteur six cylindres de 8,7L. La voiture est présentée au salon de Paris en décembre 1903.

1905 Walter Christie travaille sur un modèle de voiture à traction avant, qu'il promeut en participant à différentes courses automobiles, notamment à la Vanderbilt Cup. Quelques modèles de compétition furent ensuite équipés d’une transmission intégrale.

1907 Daimler Motoren Gesellschaft construit le Dernburg-Wagen, un 4x4 également pourvu de quatre roues directrices.

1908 Zachow et Besserdich développent un véritable 4x4, le "Battleship".  Fort de leur invention, les deux ingénieurs créent la Four Wheel Drive Auto Company,( FWD) en 1909.

1911 Georges Latil conçoit et réalise un véhicule tout terrain à quatre roues motrices et directrices.

C’est sur les camions que le concept de 4 roues motrices va s’imposer dans un premier temps.

Pierre Fenaille et Jean-Albert Grégoire avec l'invention du double cardan sphérique vont ensuite révolutionner la technologie de la roue à la fois motrice et directrice.

1926 Le joint Tracta est un double cardan sphérique breveté le 8 décembre 1926 par Pierre Fenaille, associé de Jean-Albert Grégoire dans la société Tracta. Grâce à cette invention, les tractions avant deviennent fiables et performantes. Les Tracta participent aux 24 heures du Mans 1927.

1930 Un ingénieur italien, Antoine Pichetto, dessine à Turin une voiture de course à quatre roues motrices. Le projet est présenté à l’usine Bugatti. Jean s’enflamme et l’italien « Bugattise » son étude en y incorporant le moteur T50, 4.9L à compresseur. L’inexpérience de l’inventeur lui fait prévoir des roues avant avec des joints de cardan simples.  La voiture est lourde et va se révéler très difficile à piloter. Trois voitures seront construites. Malgré son accident à Shelsley Walsh, Jean qui se cramponne à son idée engage une T53 dans la course de côte de la Turbie en 1934. René Dreyfus bat le record à plus de 100 km/h de moyenne. Les efforts physiques pour maitriser la bête sont tels qu’après les 6,3km du parcours, le pilote est à bout de force. Jean Bugatti insiste et engage la T53 au Grand Prix de Monaco 1934. Après seulement deux tours, Albert Divo qui est pourtant un véritable athlète n’en peut plus. Les freins vont rendre l’âme avant le conducteur. Ettore Bugatti toujours soucieux de se montrer à la tête du progrès laissa entendre qu’il proposait pour la première fois dans l’histoire une véritable voiture de course à quatre roues motrices mais doute ignorait-il les travaux de Walter Christie.

La transmission intégrale sera mise en évidence lors de la seconde guerre mondiale au travers des célèbres Jeep. La technologie reste essentiellement cantonnée au transport routier et au tout terrain. Les engagements en compétition sont anecdotiques et les différentes tentatives d’imposer la technologie sur les formules 1 se soldent par des échecs.

Au salon de Genève 1980, Audi présente une innovation technique, la ‘Quattro’. Elle est pourvue de la transmission intégrale dont l’idée de base avait déjà été mise en évidence dans le véhicule tout terrain ‘Iltis’. Que ce soit sur neige, verglas, boue ou pluie, ce modèle donnait une dimension nouvelle à l’automobile. Pour chaque modèle de sa gamme, Audi allait par la suite proposer une version ‘Quattro’. Audi Sport se tourna alors vers le rallye pour démontrer la qualité de ses modèles de série et de sa technologie 4x4 par l’intermédiaire de la compétition.

1981 l’Audi Quattro gagne les rallyes de Suède, San Remo et le célèbre RAC britannique.

1982 le titre mondial dans le championnat du monde des rallyes couronne une année de succès. Les équipages Hannu Mikkola/Arne Hertz, Michèle Mouton/Fabrizia Pons, Stig Blomqvist/Björn Cederberg jouèrent un rôle déterminant.

Lors des saisons 1983 et 1984, Audi et ses pilotes remportent tous les titres. On attribue à l’Audi Quattro le titre de voiture de compétition de l’année 1984 afin de récompenser ses travaux de pionnier en matière de développement de la transmission intégrale dans le sport automobile. Les multiples victoires ravivent totalement l’image du constructeur. Peugeot avec ses Turbo 16 et plus récemment Citroën ont utilisé des technologies similaires pour dominer à tour de rôles les épreuves de rallyes.

1983 Les constructeurs sont encouragés à venir en compétition à la condition de commercialiser 200 exemplaires d’un véhicule : c’est le groupe B.  La Porsche 959 apparaît en 1983 au salon de Francfort sous la forme d'un prototype, la 911 Gruppe B.

1984 René Metge sur le prototype Porsche 911 4x4 remporte le Paris-Dakar.

 

La première quatre roues motrices aux 24 heures du Mans

Porsche et Peter Schutz décident d’engager la Porsche 959 dans le Paris Dakar et de développer une version endurance sous l’appellation 961.

La Porsche 959 pilotée par l’équipage René Metge/ Dominique Lemoyne remporte le Paris Dakar.

 

9 mai 1986 Journée préliminaire des 24 heures du Mans

Dix-sept voitures seulement se déplacent dans la Sarthe pour cette journée d’essais préliminaires. Première voiture à quatre roues motrices au Mans, la Porsche 961 est bien entendu la grande curiosité de cette journée.

Porsche souhaite avant tout mettre en avant son savoir-faire. Extérieurement, la 961 est peu différente de la 959 de série. La carrosserie est blanche immaculée sans marquage publicitaire en dehors de petits stickers de partenaires.  Le moteur est très inspiré de celui des Porsche 956/962 Groupe C, c’est un 2,85 litres à quatre soupapes par cylindres gavé par deux turbos compresseurs KKK. La puissance annoncée est de 680CV.

La  961 dispose d’un ordinateur de bord qui permet de passer à 2 roues motrices en ligne droite pour un rendement maximum dans les Hunaudières. Un système multi disque permet de compenser les pertes d’adhérence sur l’un des trains et l’auto dispose d’une unité de contrôle électronique de répartition variable du couple moteur. Un certain nombre de capteurs intégrés dans le châssis mesurent en temps réel la vitesse, le patinage, le régime et les commandes du pilote transmises au véhicule. Ces informations sont traitées par cette unité de contrôle qui détermine la répartition précise du couple moteur.

René Metge et Claude Ballot pilotent ce monstre de technologie.

 

Les 24 heures du Mans 1986

La Porsche 4x4 est la seule voiture engagée dans la catégorie GTX.

ABS, climatisation, servo direction et une multitude d’équipements de série ne figurent plus dans la version 961. Avec ses 1169 kilos, soit 281 kilos de moins que la version route, la Porsche no 180 est toutefois la plus lourde des voitures vérifiées. A ce handicap de poids viendra s’ajouter celui des freins qui seront soumis à de très fortes sollicitations à la fin des lignes droites.

26ème temps des essais  : René Metge 3’43’’45 – Claude Ballot Léna 3’46’’03

24 heures du Mans 1986 - Porsche 961 no 180

24ème à mi-course. Le monstre de technologie tourne comme une horloge. En dehors d’un ressort d’accélérateur et d’un changement de demi-arbre de transmission à 9h26, la course s’effectue sans soucis. La pluie qui aurait pu être une alliée intéressante ne viendra pas et l’intégralité de l’épreuve s’effectuera sur une piste sèche.

L’équipage va bénéficier de la défaillance de nombreux concurrents et termine à une très honorable 7ème place derrière six Porsche groupe C.

Ce résultat est synonyme de victoire dans la catégorie IMSA-GTX (elle était la seule au départ dans cette catégorie). L’équipage sera également récompensé par le Trophée Jacques Finance décerné au premier équipage français.

7ème au classement général - 320 tours – 4.335,983  km – moyenne 180.665 km/h

Vitesse de pointe 333 km/h - Meilleur tour en course 3’47’’00

De toutes les voitures à l’arrivée, la 961 s’est montrée la plus gourmande avec une consommation de 51,1L aux 100km.

 

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