Benoit Tréluyer tentera de décrocher ce week-end une quatrième victoire aux 24 heures du Mans. Le pilote d'Alençon a l'occasion de rejoindre Henri Pescarolo et Yannick Dalmas au palmarès de l'épreuve.
 

 

Comment abordes-tu les 24 heures du Mans 2015 ?

On sait que la voiture est bien. On a l’expérience, on part avec l’outil capable de gagner mais Le Mans c’est toujours difficile car nous ne sommes pas à l’abri d’une erreur ou d’un problème mécanique. C’est une course sprint pendant 24 heures, les voitures souffrent beaucoup plus qu’avant.
 
 
Benoist Treluyer


Des évolutions majeures sur l'Audi depuis l’an passé ?

L’aéro et la partie hybride ou nous sommes maintenant dans la catégorie 4 mégajoules. On a aussi progressé dans l’utilisation de la voiture. L’an passé nous sommes arrivés avec une très bonne voiture mais elle était également très complexe. Au niveau du pilotage, nous avions trop de choses à faire. Sur le volant il y avait un peu trop de boutons pour vérifier ou contrôler, de mon côté j’avais un peu de mal à tout faire en même temps. Depuis, nous avons essayé de simplifier, ce qui rend le travail du pilote plus facile et nous sommes plus concentrés sur le pilotage.


Porsche sera l’adversaire à battre ?

Au vu du début de saison, je dirai que c’est Porsche mais Toyota est là. Je pense que Toyota s'est concentré sur Le Mans. Ils sont peut-être un peu à la bourre suite à quelques soucis cet hiver mais je crois que leur objectif c’est Le Mans. Ils ont remportés les championnats du Monde pilotes et constructeur, ils ne leur manque plus que Le Mans. Est-ce que le projet rallye est venu perturber le projet Endurance ? Peut-être, mais je ne sais pas. Ils ont progressé, mais nous avons plus progressé qu’eux, idem chez Porsche.


Porsche arrive cette année avec des fusées par rapport à vous

Porsche est partie d’une feuille totalement blanche alors que pour nous ce n’était pas totalement le cas. Nous avions déjà l’hybride et la fiabilité. Nous sommes plus dans la continuité. Porsche a peut-être fait des choix techniques plus avantageux ? On a prouvé que nos choix étaient bons aussi, notre seule erreur à peut-être été de faire trop complexe au début. La catégorie 8 mégajoules leur donne un avantage en ligne droite.

A Spa, on sortait du Raidillon avec le maximum de boost. A la fin de notre boost, ils nous distançaient, on avait vraiment l’impression qu’ils disposaient de plus de chevaux alors que dans d’autres lignes on allait aussi vite qu’eux. L’exploitation de la puissance est totalement différente, nous n’avons pas la même énergie électrique et nous ne l’utilisons pas forcément aux mêmes endroits et pourtant à la fin du tour ça donne les mêmes temps.
 

L’utilisation du boost est différente en fonction des circuits ?

Tu utilises au maximum ton boost lorsqu’il y a une grande ligne droite derrière, en évitant de l’utiliser ailleurs. C’est compliqué car il y a beaucoup de paramètres.
 

Parmi tes adversaires, tu as oublié de citer Nissan

Honnêtement je ne pense pas qu’ils puissent jouer la victoire. Il faut être réaliste. Ils n’ont pas disputé les deux premières courses. Ils arrivent avec un projet totalement différent, avec une toute nouvelle philosophie. Je pense qu’ils vont galérer surtout au début.
 

Au niveau de l’aéro, il y a des nouveaux rétroviseurs...

Mais il n’y a pas de rétroviseurs (rire…) . Oui, effectivement, c’est un petit plus, c’est du détail, ce n’est pas grâce à ça que tu fais la différence. Ce n’est pas parce que tu enlèves les rétros que tu gagnes 10 km/h mais encore une fois, on va chercher à améliorer des petits détails partout.


On voit correctement dans les mirroirs ?

Haut ou bas, c’est pareil, on voit aussi bien derrière.


Il y a également une multitude d'autres évolutions

On ne laisse rien au hasard, les rétros sont un peu une sorte de caricature. On cherche à optimiser tout dans absolument tous les domaines. Les ingénieurs arrivent quelquefois avec des trucs incroyables et tu te dis c’est trop. Si tu veux gagner, y compris dans le sport en général, tu dois optimiser, optimiser et encore optimiser.

Si on regarde de près l’histoire d’Audi, on se rend compte que la première année d’une voiture n’est jamais la meilleure. Généralement on a toujours été meilleur en améliorant ou en faisant progresser le modèle sorti l’année précédente. Lorsque l’on crée une nouvelle voiture, on a tendance à privilégier la fiabilité alors que l’année suivante, on travaille davantage sur l’optimisation du potentiel. L’an passé, nous avions une bonne base et cette année nous l’avons fait évoluer de façon spectaculaire.

Le Mans cette année va être exceptionnel, vraiment. En premier lieu, il y aura de la bagarre et deuxièmement à causes des performances, tous les records risquent de tomber. Ça va être une sacrée année.


Le Mans c’est particulier pour un pilote Français ?

Oui je pense, surtout pour moi qui suis né à Alençon, à côté d’ici. Je suis venu ici pour voir toutes sortes de courses de motos ou de voitures. Pour moi Le Mans, c’est le sport mécanique. Je connais pas mal de gens ici. C’est particulier pour moi comme aussi pour Loïc (Duval) car il est de Chartres. Pour d’autres comme Marcel ou André, c’est particulier car c’est un rendez-vous exceptionnel.  Lors des briefing avant la course, on décide qui va prendre le départ. Je pourrai bien sur le faire si on me le demandait mais je préfère de loin vivre vivre ça comme spectateur. La cérémonie de départ, la musique et puis les voitures qui arrivent de front à la chicane, rien que d’en parler, j’en ai la chair de poule. C'est quelque chose que tu ne vois nulle part ailleurs. Si je devais prendre le volant, la concentration ne me permettrais pas de vivre ça pleinement.
 

Concrètement, tu préfères gagner Le Mans que le championnat du Monde ?

Je préfère tout gagner (rire). Si je devais choisir, j’ai une petite préférence pour Le Mans mais j’aimerai aussi regagner le championnat du monde.


On te retrouve l’an prochain avec le n°1 ?

Oui, j’espère, mais pour cela il faut gagner le championnat…(rire)


Tu es candidat à une quatrième victoire, tu peux égaler Henri Pescarolo ou Yannick Dalmas

J’ai justement eu Henri il y a 15 jours au téléphone, donc j’y pense (Rire…). Rejoindre Henri ou Yannick sur le podium français ce n’est pas l'objectif premier, mais tu y penses. Ce serait une récompense pour tous les gens qui m’ont aidé depuis le début de ma carrière. Ce serait effectivement un petit plus en cas de victoire, la cerise sur le gâteau car le gâteau, on l’a déjà eu en 2011. Henri est une légende, Yannick aussi, mais Henri particulièrement sachant qu’il m’a beaucoup apporté. Arrivé au niveau de mon prof, ce serait effectivement pas mal. Faudrait que je remercie aussi Audi, car sans Audi j’aurai eu du mal à obtenir pour le moment 3 victoires.


 
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